Les cimetières sont remplis de sociétés qui n’ont pas compris les règles du jeu.
Il n’y aura pas d’article la semaine prochaine. Le présent article cherche à donner des pistes sur la façon dont les entreprises pourront se positionner stratégiquement dans les années 2020.
La vente est un des plus vieux métier du monde: le colporteur a cédé la place au commercial, au marketeur puis au développeur (plus noble).
Le colporteur (François Marius Granet)
Cette sémantique variée regroupe trois fonctions essentielles de la vente: la prospection, la persuasion et l’affectio (qui mène à l’achat répété). La transformation actuelle profonde de ce métier a des conséquences majeures sur les sociétés dites commerciales. Explication:
De Benedict’s newsletter (20 janvier 2020):
Google souhaite supprimer progressivement la prise en charge des cookies tiers (c'est-à-dire le comportement intersite et le suivi des annonces) dans Chrome (qui représente environ 70 % du trafic web des ordinateurs de bureau) d'ici deux ans. Apple le fait déjà dans Safari d'iOS, qui est le site web mobile le plus utilisé aux États-Unis. Cela permettra à la fois de protéger la vie privée et de réduire la valeur des modèles publicitaires actuels des éditeurs, tels que, par exemple, le NY Times, puisqu'ils en sauront moins sur vous. Bien sûr, par pure coïncidence, cela n'affecte pas ce qui se passe sur un seul site en boucle fermée, comme pour la publicité de recherche Google ou Facebook. En d'autres termes, en protégeant la vie privée, Google (et Apple) rendent les annonces sur Google et Facebook plus attrayantes et affaiblissent la plupart des autres modèles publicitaires.
Avec l’internet, accéder à ce que l’on veut n’a jamais été aussi facile, en revanche, l’accès au client n’a jamais été aussi difficile:
Plus de 4 milliards d’individus ont un smartphone et peuvent acheter ou louer ce qu’ils veulent en utilisant des millions d’applications. La demande ne suit plus une loi de Gauss, continue, mais la loi du tout ou rien. Alex Danco dans cet article sur l’abondance a publié un graphique éloquent:
A gauche se trouve le monde pré -internet, le médiocristan, dans lequel il faut s’adapter à ce qu’on nous propose, même si ce n’est pas totalement ce qu’on aurait aimé. A droite, est décrit le monde actuel, binaire, l’extremistan, où on ne s’embarrasse pas à accepter quelque chose qui ne nous satisfait pas pleinement. Poussé jusqu’au bout, le monde des objets fait place au monde des fonctions (de la voiture à Uber)
Vu de la perspective du vendeur, la réalité est tout autre. Il est extrêmement difficile d’atteindre la personne qui sait exactement ce qu’elle veut. Il faut à la fois trouver l’oiseau rare ou sinon approchant, lui faire le pitch et gagner sa confiance. Autant trouver une aiguille dans une botte de foin. La difficulté de l’exercice pousse à des solutions technologiques, donc à des effets d’échelle et au « winner takes most ». Le métier de la vente passe aussi du mediocristan à l’extremistan. La vente est trustée par quelques plateformes.
On s’extasie facilement sur tout ce qu’apportent les Google, Facebook ou Amazon aux sociétés commerciales, leur permettant de cibler leur clientèle, vendre d’avantage, diminuer leurs coûts fixes, etc. Quel est l’envers du décor ?
Abdiquer la vente, c’est renoncer au pouvoir
Le pouvoir est la capacité à forcer les gens à faire ce qu’ils ne veulent pas faire:
Y a t-il meilleure caractérisation du pouvoir du commercial ? Quand on le chasse par la porte, il passe par la fenêtre. Pour une société commerciale, le pouvoir n’est pas la surface financière ou la génération de cash flow à un instant t, mais la capacité à augmenter ses prix (le fameux earning power), augmentation qui n’est évidemment pas souhaitée par les clients. Beaucoup ne comprennent pas les sociétés internet car ils s’attachent trop aux pertes, incriminent la bulle financière et la folie du public au lieu de s’intéresser aux relations de pouvoir et imaginer qui va dominer et générer les futurs cash-flows. C’est tout l’enjeu de Power Game.
Le commercial est le nerf de la guerre pour une entreprise, surtout dans une société d’abondance, car son métier est de trouver le prospect puis convaincre…par définition celui qui ne l’est pas forcément au départ. Une fois le client convaincu, et avec un bon suivi, ce dernier revient, ce qui ouvre la porte à une augmentation du prix. Une société qui ne maîtrise pas son commercial est comme un éléphant dans un magasin de porcelaine. Cela finit généralement avec de la casse. Les sociétés où le commercial n’est pas fondamental est la sous-traitance. Le sous-traitant est soumis au diktat du client. Il n’y a qu’à voir comment Renault a redressé Nissan en 1999. Les Échos (9 décembre 2009):
Octobre 1999 - Carlos Ghosn présente un plan de relance du constructeur nippon. Baptisé "Nissan Revival Plan" (NRP), ce plan triennal vise un retour dans le vert dès la première année ainsi qu'une marge d'exploitation de 4,5% et une dette moitié moindre avant trois ans. Des objectifs qui impliquent un véritable traitement de choc. Dans la foulée de l'annonce, des sites de production sont fermés et le "keiretsu", conglomérat formé par l'entreprise et ses fournisseurs, est démantelé. Quelque 21.000 salariés et 500 équipementiers en font les frais. Mais les coûts de personnel et la facture achats du japonais (alors de 25% à 40% plus élevée que celle de Renault) s'en trouvent considérablement allégés.
A l’inverse Coca Cola incarne le commercial à l’état pur. Pour battre tous les copycats qui ont proliféré depuis la création de la société en 1885, avec un breuvage composé d’un peu de concentré et de beaucoup d’eau, il fallait vraiment être persuasif: Candy-Cola, Gay-Cola, Roxaka-Kola, Its-a-Cola, Afri-Cola, Kiss-Cola, Co-Cola, Kaw-Cola, Klu Ko Kolo, Chero-Cola, Pepsi-Cola, etc. Plus d’une centaine d’imitateurs que Coca Cola a coiffé au poteau grâce à une stratégie commerciale agressive (distribution gratuite- le fameux modèle freemium-, forme de la bouteille, colportage, prix fixe minime, publicité). Coca Cola illustre parfaitement la puissance du commercial, et cela se traduit dans des marges opérationnelles de plus de 25%.
Comment les GAFA désintègrent la fonction commerciale
Ils ont commencé par séduire la planète internet en apportant l’abondance et surtout en la triant, là où il y avait la rareté, une amélioration ^10 par rapport au monde ancien: Amazon a commencé avec les livres puis s’est étendu progressivement à tout le commerce. Google a permis de trouver l’information souhaitée instantanément, Facebook de se connecter à ses amis 24 h sur 24. Fascinés par ces services, les internautes les ont intégrés dans leur vie quotidienne, comme des compagnons. Dans un monde d’abondance qui est celui de l’internet, être le compagnon, l’interlocuteur de confiance de l’internaute est extrêmement précieux, il y a peu d’élus. Une fois cette position acquise, souvent à grands frais, en cassant les prix, les grandes plateformes ont entrepris de désintégrer la société commerciale, un mix production et commercial. Le commercial devient une affaire d’échelle, bien mieux fait et à moindre frais par un GAFA. Ce dernier commence par prendre une fonction du commercial mais la destination est la désintégration totale. Reprenons les trois plates-formes:
Amazon a préempté dès le départ la relation client. Une entreprise pouvait utiliser sa plate-forme pour vendre plus mais pas constituer une relation client. Les fonction de prospection et persuasion pouvaient être laissées aux entreprises, en théorie. En réalité, c’était soit la popularité du produit ou l’algorithme d’Amazon qui faisait le choix de tête de gondole, rien à voir avec le commercial de l’entreprise. Pour éviter cette loterie, Amazon a proposé un service payant de placement des produits des entreprises en tête de gondole. Quand la gondole est immense, la position de tête conduit d’autant plus facilement à la vente. C’est là que les entreprises abdiquent complètement la fonction commerciale…mais la défaite est masquée par des ventes en augmentation. Le moteur de recherche d’Amazon taxe les entreprises de $10 milliards par an!
Par Facebook, toute entreprise peut créer une page et essayer de se mettre en avant en créant le buzz. Il y a 140 millions d’entreprises sur Facebook dont 8 millions payantes seulement. Le problème du buzz est qu’on ne maîtrise rien. La prospection est laissée à l’éditeur viral…et à l’algorithme Facebook, qui peuvent éliminer son message en cours de route. Le plus efficace est de confier la prospection (le ciblage) et la persuasion (le bon moment et le bon message) à Facebook. Il suffit de se brancher à l’API Facebook, Instagram ou Messenger. L’entreprise peut espérer récupérer la relation client par la suite, la publicité Facebook conduisant au site ou à l’application de l’entreprise. Cependant d’une part Facebook veut rendre de plus en plus facile l’achat direct en passant par sa propre application. L’entreprise risque de perdre tout le commercial sous la pression des utilisateurs Facebook. C’est la tendance: Instagram permet déjà de créer une boutique dans laquelle l’abonné pourra se balader et acheter. Facebook veut également avancer sur les moyens de paiements pour garder l’utilisateur dans son écosystème. D’autre part et nous le verrons avec l’exemple de Google, le renvoi sur un site ou une application est inefficace à lui seul pour construire une relation commerciale.
Google est dans le même cas. Au départ, il empêche son moteur de recherche d’être exploité à des fins commerciales, engageant une guerre contre le SEO, l’arme de prospection des sociétés commerciales. Puis il donne directement les réponses aux requêtes par des encadrés sans conduire vers les sites tiers. Parallèlement il propose son service de prospection: les mots clés. Par l’achat de Double Click en 2007, Google maîtrise le ciblage sur les sites tiers (en dehors de l’univers Google). C’est un moyen d’étendre sa plate-forme publicitaire a tout l’internet, nourrie par les données collectées par Google. La société prend de plus en plus de taches du commercial à son compte, transformant Adwords en Google Ads. Voici comment Google présente son service:
Avec Google Ads, votre annonce peut s'afficher lorsque les internautes effectuent des recherches en ligne sur les produits et les services que vous proposez. Notre solution publicitaire fait appel à une technologie intelligente afin de diffuser vos annonces auprès de clients potentiels, au moment précis où ils sont prêts à effectuer une action.
La prospection est faite par Google (technologie intelligente) et l’étape de persuasion est quasiment éliminée puisque l’annonce est présentée quand l’internaute veut acheter. Il ne reste plus qu’à capter la relation client. En théorie Google laisse sa chance à l’entreprise (à la différence d’Amazon) puisque l’annonce est censée amener l’internaute sur le site ou l’application de l’entreprise. Et là, l’entreprise a carte blanche pour construire sa relation client. Malheureusement, cela reste très théorique et il y a des obstacles psychologiques qui rendent la construction d’une relation client plus difficile par internet qu’avec une présence physique. La théorie des signaux coûteux permet de le comprendre. Cette théorie a été parfaitement décrite par Rory Sutherland, vice chairman d’Ogilivy, dans ce tweet:
Plus un message est coûteux, plus son destinataire le prendra en compte: il signifie que l’émetteur du message a réussi et fait attention à son destinataire. Aussi une relation pourra se créer entre le destinataire et l’émetteur dudit message. Un exemple dans la nature est le paon. Alvin Roth dans son livre Les marchés où l’argent ne fait pas la loi explique le phénomène:
Paradoxalement, les signaux les plus faciles à interpréter sont généralement les plus chers à envoyer. Selon les biologistes, l'évolution conduit parfois à l'apparition de signaux coûteux pour favoriser le marché de l'accouplement, comme c'est le cas pour la queue du paon. Le paon mâle tire peu d'avantages directs d'une queue énorme et colorée qui signale sa présence aux prédateurs et l'empêche de fuir facilement. Mais sa queue envoie un signal puissant sur son état de santé. Un paon malsain ne pourrait pas être équipé d'une queue aussi large ou ne pourrait pas s'échapper des griffes d'un renard et serait mangé. Une magnifique queue annonce aux femelles locales que son détenteur est doté de ressources génétiques impressionnantes. (Les biologistes évolutionnistes parlent des "quatre B" de la sélection naturelle: manger, se battre, battre en retraite et b. Disons se reproduire. Si une large queue en éventail apparaît comme un "handicap" pour les trois premières catégories, elle envoie un signal concernant sa condition physique essentielle pour le quatrième.) Le phénomène de «queue de paon» n'est pas observé uniquement en milieu animal.
Cette théorie s’applique aussi aux relations humaines: un faire-part de mariage sera envoyé sur papier cartonné, voire vélin, pas en message électronique. Une banque veut impressionner et engager ses clients par de magnifiques locaux, Apple crée des Apple Stores dans les lieux prestigieux, les universités se distinguent par la taille de leur campus, etc. Le monde physique est propice à l’envoi de signaux coûteux, pas l’internet sur mesure. Sur internet, tout est ciblé, optimisé, rendu facile à faire, l’inverse du signal coûteux. C’est pourquoi Shopify qui veut se faire le porte parole des marchands face à Amazon qui les écrase n’est pas une aide pour la commercialisation: Shopify simplifie à l’extrême la constitution de son site marchand avec intégration de moyens de paiements, logistique, etc. au prix de base de €29 par mois. Où est le signal coûteux ? L’offre marketing de Shopify consiste à se brancher en API à Google et Facebook. Shopify fait entrer les sites marchands dans la gueule du loup. Voici le pitch:
L’étape suivante pour les GAFA est de verrouiller définitivement les porte de l’internet à toute activité commerciale autre que la leur.
Comment les GAFA verrouillent la relation client
Pour capter complètement le client, les GAFA veulent maintenant empêcher les entreprises de vendre en dehors de leur écosystème:
Le temps passé sur les smartphones augmente par rapport à celui passé sur les autres écrans. De ce fait les requêtes se font de plus en plus en mobilité, comme le montre le graphique suivant aux Etats-Unis:
Or on consulte son smartphone différemment d’un PC. Il faut avoir l’information plus rapidement, on s’arrête aux premiers choix. Google et Amazon en profitent pour monopoliser l’écran avec des publicités. Voici l’écran obtenu quand on cherche « chaussures » sur l’application Amazon:
Si je cherche chaussure sur Google:
Amazon et Google se transforment progressivement en moteurs de recherche publicitaires ! Les entreprises doivent payer leurs taxes s’ils veulent vendre.
Les GAFA éliminent la concurrence des réseaux publicitaires tiers. La matière première de ces réseaux est le cookie. Supprimez le cookie et vous n’aurez plus de réseau publicitaire tiers, l’ensemble du commerce digital devra être confié à Google, Facebook ou Amazon. Les GAFA ont créé une alternative aux cookies avec leurs services publicitaires sur réseau tiers alimentés par leurs propres données utilisateurs: DoubleClick, Facebook Audience Network et Amazon Publisher Services. Les sociétés de telecom comme Verizon et AT&T qui ont déjà plus en 100 millions de clients ont imaginé pouvoir concurrencer les GAFA sur le web en intégrant également des réseaux: leur idée était que l’utilisation de leurs données client plus des cookies pouvait leur donner une capacité de ciblage supérieure aux GAFA ainsi qu’une audience plus importante. Verizon a acheté Yahoo à cette fin et AT &T AppNexus. La priorité des GAFA est donc de les affaiblir. C’est pourquoi après que Safari, le navigateur d’Apple le plus utilisé sur les smartphones (au moins aux Etats-Unis) a supprimé le traçage par cookies, Google est en train de faire de même avec son navigateur Chrome, qui domine le PC avec 70% du marché.
Avec internet est né un nouveau type de commercial: l’influenceur. L’influenceur est très bon en commercial car il respire l’authenticité, ce qui est idéal pour créer une relation. L’influenceur est un partenaire du GAFA mais peut lui faire concurrence car il transcende une plate-forme donnée. S’il décide de changer de crémerie, ses abonnés suivent. Ainsi Ninja avec ses 15 millions d’abonnés a quitté Twitcher pour Mixer le 1 août 2019. Amazon a perdu un porte-parole très efficace car il ne le rémunérait pas assez. La plate-forme la plus à risque est Instagram qui concentre le plus d’influenceurs massifs: Ronaldo a par exemple 200 millions d’abonnés sur le milliard d’Instagram. Le principal abonné Youtube n’a que 100 millions d’abonnés. La perte d’un influenceur peut être dommageable à Instagram. Cela explique la nouvelle politique qui est de masquer les like afin d’éviter les effets boule de neige trop massifs. Il faut s’attendre à d’autres manœuvres des GAFA pour garder le leadership sur la commercialisation.
Les GAFA ont su capter leurs abonnés dès les démarrages de l’internet en utilisant justement la théorie du signal coûteux: Un investissement massif dans leur service occasionnant de lourdes pertes souvent pendant des années: trois ans seulement pour Google, six ans pour Facebook, six ans pour Amazon. Cet investissement massif leur a permis de créer une véritable relation de confiance avec l’utilisateur, dont ils font levier maintenant pour se lancer dans de multiples autres activités, l’utilisateur étant déjà acquis. Les GAFA sont une créature mythologique: un corps de sirène et des tentacules de pieuvre. Le problème pour l’entreprise qui sous-traite son commercial est très simple: quid si le commercial décide de vendre autre chose ?
SAAS contre Microsoft
La stratégie commerciale des GAFA fait exploser le coût d’acquisition des clients. Autant il devient plus facile de vendre par leur intermédiaire, autant il devient quasi-impossible d’établir une relation de confiance sur le long terme, d’acquérir un client, car on rentre en concurrence avec eux. D’une manière ou d’une autre, il faut émettre du signal coûteux pour créer une relation durable. Un cas d’expérimentation intéressant pour comprendre est le combat entre les sociétés de logiciels cloud (SAAS) et Microsoft. Ce dernier joue le rôle de GAFA ayant déjà largement conquis la clientèle entreprise grâce à Windows et Office. Comment donc les SAAS arrivent-t-ils à percer commercialement ? Un mélange de stratégie en ligne et …hors ligne:
En ligne, un moyen d’émettre du signal coûteux est de donner. On peut bien sûr donner de l’argent, ce qu’on fait les GAFA. Mais pour se faire entendre, il faut donner encore plus maintenant (Uber, WeWork). Il y aura peu de nouveaux élus. Une autre méthode existe: le don de créativité sous forme de vidéo (YouTube, Tiktok), texte (blog, newsletter) ou code (software open source). Il s’agit de créer une audience. Une fois l’audience acquise, la vente est facilitée, on peut se constituer une niche au milieu des passionnés d’une même cause. C’est ce que font les SAAS avec le modèle freemium, donnant leur code en open source sur Github et s’attirant des hordes de fans dans les entreprises. Ces fans deviennent alors les meilleurs commerciaux de l’offre SAAS auprès de leur directeur informatique. Il n’est pas étonnant que Microsoft ait acquis Github pour étouffer cette menace…
Hors ligne, il faut appliquer la stratégie de l’exubérance et déployer des moyens ostensibles. Les SAAS embauchent une force de vente non négligeable pour démarcher les entreprises à l’ancienne et compléter la stratégie virale. Quelques exemples typiques:
Le point notable est que pour acquérir des clients, les sociétés doivent payer de plus en plus cher avec un risque de churn élevé. Dans le même temps, les GAFA, ou Microsoft pour l’entreprise peuvent diversifier leurs activités et concurrencer les dites entreprises en frontal car elles ont le client. C’est ainsi que Slack comme Box courent les plus grands risques avec l’arrivée de Teams (Microsoft) sur leur terrain. Le coût de l’abonné supplémentaire devient vite prohibitif quand Microsoft commence à s’intéresser à la question.
On peut tirer de cette tendance quelques enseignements :
les affaires de niche, voire d’hyper-niche, ont plus de chance d’atteindre leur cible dans un monde où le commercial leur échappe.
Si le coût d’acquisition du client est une barrière à l’entrée, ceux qui ont déjà la clientèle sont largement favorisés. Leur valeur potentielle monte. Les vieux médias, sociétés de câble ou de telecom sont dans ce cas. La question devient de trouver les bons produits.
Leur stratégie doit être comme celle des GAFA de proposer de nouveaux services au mêmes clients, afin d’amortir au maximum leur avantage commercial relatif. Apple monétise à fonds sa base de fans d’IPhones avec Watch, AirPods, TV, Music, AppStore, etc.
Il faut s’attendre à des concentrations visant à faire du cross selling. L’acquisition de Pandora par SIRIUS XM, faisant passer ce dernier de 30 à 100 millions de clients peut s’interpréter ainsi.
les sociétés anciennes générant de forts cash flows doivent les brûler en signaux coûteux s’il veulent gagner de nouveaux clients. Comcast a justement appelé sa nouvelle application de streaming Peacock (le paon): tout un symbole…
Les GAFA en herbe (type Uber ou Airbnb) doivent retarder leur monétisation au maximum afin de gagner des clients. C’est la théorie du signal coûteux en action.
L’avenir est aux sociétés intégrées qui se vendent à eux même et peuvent ainsi gagner en marges, ce qu’ils perdent en expansion horizontale.
Twilio est au commercial ce que Shopify est à l’infrastructure de vente au détail, une bouée d’oxygène. Il essaie de redonner aux entreprises la maîtrise de leur commercial en leur permettant de se brancher par API à un service de communication par sms, mail, plateformes vidéo, WhatsApp, etc. L’objectif est de regagner la relation client.
Il n’y a plus beaucoup de place pour le rôle de super-commercial mais les challengers sont à scruter de près…c’est le gros lot s’ils arrivent à franchir le Rubicon.
Bonne fin de semaine,
Hervé