Le pari fou de Dunkerque
Les cimetières sont remplis de sociétés qui n’ont pas compris les règles du jeu.
Energeek, le 15 mai 2023:
La visite du président de la République Emmanuel Macron à Dunkerque, ce 12 mai 2023, a permis d’officialiser deux projets complémentaires dans la ville : l’implantation d’une usine de batteries de véhicules électriques par le taïwanais ProLogium et la création d’un site de production de « matériaux de cathodes pour les batteries lithium » cogéré par le français Orano et le chinois XTC. Les quatre usines de batteries de véhicules électriques prévues ou en construction en France sont toutes implantés dans les Hauts-de-France, et particulièrement dans l’ancien Nord-Pas-de-Calais…Le 9 mai 2023, le groupe taïwanais ProLogium avait en effet confirmé une information révélée la veille : il a choisi le port de Dunkerque pour implanter sa première usine hors de Taïwan, qui devrait fabriquer d’ici la fin de l’année 2026 des batteries « solides » de véhicules électriques. L’investissement total d’ici 2030 est évalué par le groupe à 5,2 milliards d’euros : il générerait 3 000 emplois dans l’usine et 12 000 emplois indirects pour le territoire.
Les batteries solides doivent pallier certaines limites des batteries Lithium-Ion actuelles: plus d’autonomie, plus de sécurité, moins d’incendies, une charge plus rapide. A terme, l’usine devrait pouvoir « équiper 500 000 à 750 000 véhicules électriques par an ». En s’appuyant sur les chiffres de 2022 (1,529 million de voitures neuves vendues), cela représenterait entre 32,7 % et 49 % du marché français. Mais l’usine serait bien entendue pensée aussi pour l’exportation…L’usine de ProLogium est la quatrième dédiée aux batteries de véhicules électriques à être lancée en France, et toutes sont situées dans les Hauts-de-France, qui n’a jamais aussi bien mérité son surnom de « Sillicon Valley » des batteries. Plus spécifiquement, ces usines seront toutes installées dans l’ancien Nord-Pas-de-Calais.
Outre ces deux projets, les Hauts de France devraient accueillir trois autres giga-usines: la plus avancée est celle construite par la co-entreprise ACC entre Stellantis, Mercedes et Total qui devrait commencer à produire en 2023 à Douvrin. Renault soutient deux projets: l’un avec le fabricant de batteries chinois Envision à Douai, l’autre avec la start up française Verkor à Dunkerque. Au total, la capacité projetée dans les Hauts de France est de 168 GWh d’ici 2030, dépassant largement les besoins français et représentant 20% de la capacité européenne. Les quatre giga-usines fabriqueront des batteries à cathodes lithium-nickel-cobalt. Ce point a une grande importance comme il sera vu plus tard.
On ne peut qu’applaudir de tels projets créateurs d’emploi dans une industrie pleine d’avenir. Le diable est dans les détails. C’est eux que je vais examiner aujourd’hui.
Batteries: chimie ou tech ?
La presse en vantant « la Silicon Valley des batteries » (la mention est très répandue dans les différents articles que j’ai pu consulter) reflète une erreur majeure occidentale concernant la conception des batteries électriques. La Silicon Valley n’est technologique que parce que le silicium est super abondant et ne rentre pas ou très peu dans l’équation de la fabrique de puces. La valeur ajoutée dans l’industrie des semi-conducteurs est essentiellement humaine: comment empaqueter plus de transistors au mm2 et comment les utiliser au mieux. C’est pourquoi la Silicon Valley regorge d’ingénieurs très bien payés qui font faire des progrès rapides à l’industrie (doublement de l’empaquetage tous les deux ans environ). La valeur du silicium est infinitésimale rapportée à l’ingéniosité déployée pour multiplier sa puissance.
Tout est différent dans la batterie électrique: les matériaux utilisés sont potentiellement rares et le processus est chimique peu altérable par l’homme. Voici une explication exhaustive de GPT-4:
La charge et décharge d'une batterie de véhicule électrique reposent sur un processus électrochimique. Ces batteries sont généralement des batteries lithium-ion (Li-ion). Voici une explication simplifiée du fonctionnement de ces batteries pendant les phases de charge et décharge :
1. **Charge :** Pendant la charge, un courant électrique est fourni à la batterie depuis une source externe, comme une borne de recharge. Ce courant électrique fait circuler les ions lithium du côté cathode (électrode positive) vers l'anode (électrode négative) à travers un électrolyte. Les ions lithium sont alors stockés dans l'anode, qui est généralement composée de graphite ou de silicium. Pendant ce processus, les électrons sont séparés des ions lithium et sont stockés dans l'anode.
2. **Décharge :** Lorsque la batterie alimente le véhicule, les ions lithium stockés dans l'anode commencent à se déplacer vers la cathode à travers l'électrolyte. Les électrons libérés par ces ions lithium sont alors transférés à travers un circuit externe, générant ainsi un courant électrique qui alimente le moteur électrique du véhicule. Lorsque les ions lithium atteignent la cathode, ils sont à nouveau associés aux électrons, et le processus de décharge se poursuit jusqu'à ce que la batterie ait besoin d'être rechargée.
Le contrôle de la charge et décharge de la batterie est géré par un système de gestion de batterie (BMS, pour "Battery Management System" en anglais). Ce système surveille divers paramètres tels que la tension, le courant et la température de la batterie afin d'optimiser l'efficacité et la longévité de la batterie tout en assurant la sécurité.
Il existe plusieurs technologies de batteries pour les véhicules électriques, mais les batteries lithium-ion sont actuellement les plus couramment utilisées en raison de leur densité énergétique élevée, de leur faible taux d’auto décharge et de leur longue durée de vie.
La batterie de base pour la voiture électrique est lithium-ion. Dès lors, la différenciation est une affaire d’assemblage de matériaux composant la cathode, l’anode et l’électrolyte (la chimie) qu’il faut avoir au meilleur prix possible et les économies d’échelle de la production. Chaque matériau a ses avantages et inconvénients en terme de puissance, conductivité, stabilité et coût, les progrès sont infinitésimaux. La batterie est une “commodité”. Voici par exemple comment sont composées les cathodes et l’évolution de leurs ventes (source IEA)
Ainsi que l’exprime Steve Levine, fondateur de la lettre d’information The Electric: dans l’industrie de la batterie, les trois éléments à considérer sont “chaîne d’approvisionnement, chaîne d’approvisionnement et chaîne d’approvisionnement “.
C’est ce que la Chine a compris avant l’occident avec des conséquences importantes sur le développement de l’industrie au moins pour la prochaine décade.
La chaîne d’approvisionnement
A partir du moment où la batterie est considérée comme un enjeu de chaîne d’approvisionnement, la stratégie est claire: capter les ressources minérales et produire au moindre coût une « commodité », quitte à sacrifier sur la recherche de performance. C’est ce que s’applique à faire la Chine depuis les années 2000 où elle a commencé à investir dans la technologie lithium-ion. Le résultat est là. D’après l’Agence Internationale de l’Energie:
La Chine produit les trois quarts des batteries lithium-ion et abrite 70 % de la capacité de production de cathodes et 85 % de celle d'anodes (les deux sont des composants clés des batteries). Plus de la moitié des capacités de traitement et de raffinage du lithium, du cobalt et du graphite sont situées en Chine…La plupart des principaux minéraux sont extraits dans des pays riches en ressources tels que l'Australie, le Chili et la République démocratique du Congo par quelques grandes entreprises.
Le graphique suivant (source IEA) illustre bien la situation de domination de la Chine dans l’approvisionnement de matériaux constitutifs des batteries:
La Chine ne maîtrise pas l’extraction mais en revanche le raffinage, la fabrication des électrodes et la batterie. Cela lui permet de faire poids sur les pays miniers pour obtenir des approvisionnements meilleur marché…et surtout de garder à distance les prétendants à la batterie et aux voitures électriques, même les plus avancés au plan technologique: le raffinage est une étape incontournable. Pour donner un exemple frappant: la Chine détient presque 100% de la capacité de fabrication des anodes en graphite (la quasi-totalité du marché). Ce simple fait lui donne un pouvoir très significatif sur l’ensemble de la chaîne de fabrication des batteries au niveau mondial.
En bref, aucun pays ne peut fabriquer des batteries sans passer par les conditions imposées par la Chine. Cela donne à ce dernier pays un sérieux avantage sur l’ensemble de la chaîne, et ce d’autant que le prix de la batterie est encore un obstacle sérieux à l’acquisition d’une voiture électrique !
Le grand écart
L’Occident cherche avant tout à se distinguer par la performance (biais tech) et a méprisé la chaîne d’approvisionnement, au moins jusqu’à très récemment. La rareté potentielle du matériau ne rentrait pas vraiment en ligne de compte, l’Occident était à la recherche de la batterie miracle, rendant caduque les usines à gaz chinoises…
Deux stratégies diamétralement opposées sont à l’oeuvre: d’une part la Chine n’hésite pas à baisser en performance pour obtenir des matériaux meilleurs marchés (batteries LFP ou sodium). D’autre part l’Occident veut faire du « Zero to One » selon l’expression de Peter Thiel pour dominer le marché (batteries a l’état solide). Revenons sur ces deux orientations:
La Chine cherche à faire baisser le prix des batteries pour arriver à la fameuse parité avec le moteur à explosion, l’élément qui pourrait déclencher l’adoption. Comme elle ne maîtrise pas le minerai brut, dont elle peut être victime des fluctuations, elle n’a pas hésité à investir dans une vieille technologie de cathode à base de fer phosphate (abondant) et peu de lithium rapporté aux autres types de batteries (brevet de technologie LFP datant de 1996). La densité énergétique de la batterie est moins bonne que la traditionnelle lithium-nickel-cobalt mais elle est plus stable. Le système de gestion de la batterie peut alors être simplifié et prend moins de place. Au final, la batterie est moins cher (-15/20%) pour une performance convenable. Le compromis est satisfaisant pour le consommateur. La société chinoise BYD fait un malheur avec ses batteries LFP dites « Blade ». Ces batteries pourraient bien rendre de plus en plus obsolètes les batteries lithium-nickel-cobalt qui constituent l’essentiel des investissements, notamment en Occident. L’étape suivante est la batterie au sodium (à la place du lithium). Elle n’a apparemment rien pour plaire: moins de puissance, moins de densité énergétique, moins de conductivité (temps de charge/décharge), moins de durabilité. Mais elle n’est pas cher du tout et écologique, idéale pour une voiture « low cost ». CATL lance une batterie au sodium en 2023, BYD pourrait également en commercialiser une pour son modèle européen, la Mouette à partir de 2024.
La cathode lithium-nickel-cobalt semble être le “must” impossible à battre en terme de performance. Les occidentaux s’en tiennent donc à ce type de cathode qui dépend comme on l’a vu du bon vouloir de la Chine (Les Hauts de France en sont l’illustration). Leur priorité n’est pas de faire baisser le coût de la batterie quitte à utiliser des matériaux moins performants. Ils veulent faire des progrès décisifs sur l’anode (le graphite retenant peu d’ions) et l’électrolyte pour réduire les temps de charge et améliorer la stabilité thermique. Les grands constructeurs, type Daimler ou Volkswagen passent des accords avec des “start-ups” censées mettre au point des batteries à l’état solide (électrolyte solide au lieu du bain de lithium traditionnel) et des anodes lithium métal ou silicium. La technologie, même si prometteuse, n’est éprouvée que sur des petits volumes et reste dépendante de la Chine pour les approvisionnements (nickel et cobalt de la cathode). Elle sera en plus, si elle perce, forcément beaucoup plus onéreuse que les technologies actuelles du fait de l’absence d’économies d’échelle. Il faudra trouver une demande. La technologie de la batterie à l’état solide procède du quitte ou double.
Le marché commence à douter sérieusement des batteries « new age » telles que proposées par la société désormais cotée QuantumScape. Cette “start up” est soutenue par Volkswagen (au capital) et cinq autres constructeurs automobiles non révélés. QuantumScape veut créer une batterie à l’état solide avec une anode Lithium-metal. Les retards s’accumulent, le cours de bourse trinque:
ProLogium rentre dans cette catégorie de “start ups”. De facto, La Chine risque de produire des modèles de véhicules électriques à prix équivalent aux modèles à combustion à un horizon raisonnable grâce à ses investissements dans les batteries LFP, voire au sodium, couplés à ses économies d'échelle. Ces batteries ne sont pas glamour, mais elles font le job (capacité, temps de charge, prix). Elles équiperont probablement les 2/3 des vehicules hormis le moyen/haut de gamme. Pendant ce temps, la Chine tient l’Occident en laisse par sa maitrise de la chaine d’approvisionnement des batteries lithium-nickel-cobalt, celles qui seront produites par toutes les giga-usines occidentales.
Dunkerque et l’effet Osborne
Steve Levine, le grand spécialiste de la batterie électrique est clair sur le sujet:
Adam Osborne est célèbre pour avoir commercialisé le premier PC en 1981. Il s’appelait l’Osborne 1. Son successeur, l’Osborne 2 a rendu Adam Osborne encore plus célèbre. Il a été annoncé avec fanfare en 1982, présentait des améliorations sérieuses par rapport à l’Osborne 1. le problème est qu’il a pris du retard entrainant deux conséquences:
-les ventes de l’Osborne 1 se sont effondrées dans l’attente du nouveau modèle
-celui-ci ne venant pas, la compétition s’est introduite faisant mieux que l’Osborne 1.
La société a fait faillite en 1983. Depuis, on a théorisé cet échec: il est appelé l’effet Osborne.
L’effet Osborne pourrait bien s’appliquer à l’automobile européenne:
D’un côté on nous vante les capacités gigantesques des giga-usines, telles que celles installées dans les Hauts de France, qui vont permettre un déploiement massif de la voiture électrique d’ici peu: ACC annonce 2023, Envision 2024, Verkor (technologie de batterie encore mystérieuse) 2025 et ProLogium (batterie à l’état solide) 2027. Il y a de quoi faire saliver sur l’achat d’une voiture électrique à un prix égal à celui d’une voiture à combustion.
De l’autre, le prix de la batterie au kWh est encore loin du niveau déclencheur de l’adoption massive, estimé entre 60 et 70$/kWh (parité entre moteur électrique et combustion). En 2022, le prix de la batterie lithium-ion en moyenne s’élevait à $151/kWh, en hausse par rapport à 2021 !
Enfin les compétiteurs chinois comme BYD introduisent leurs modèles LFP en Europe dès 2023. Ils ne sont pas encore à parité avec les modèles à combustion mais nettement plus intéressants que les modèles à cathode lithium-nickel-cobalt développés en occident. La compétition chinoise va être de plus en plus mordante. Il est à noter que BYD, en prévision de l’effet Osborne, est passé au tout électrique, arrêtant de produire des véhicules traditionnels à moteur à combustion.
Un risque significatif d’effet Osborne existe pour les constructeurs automobiles européens dont les ventes de modèles à combustion pourraient s’effondrer sans avoir d’alternative électrique réellement abordable. Qu’arrivera-il alors dans un tel scénario aux giga-usines des Hauts de France ? Le haut de gamme est déjà pris par Tesla. Qu’en sera-t-il de Renault, Mercedes ou Stellantis, les commanditaires, qui devront alors rivaliser avec ce formidable compétiteur, tout en étant privés de moyens financiers du fait de l’effondrement de leurs ventes ?
On peut imaginer l’impact pour les Hauts de France et leurs giga-usines…Il est temps de s’intéresser à la géopolitique et d’arrêter de jouer les carabiniers. Construire des giga-usines, c’est bien, maîtriser les approvisionnements, c’est crucial.
Géopolitique
La batterie est un enjeu géopolitique à l’instar du pétrole ces dernières décennies. Un OPEC des batteries pourrait bien se constituer avec la Chine tenant la place de l’Arabie saoudite (puissance 10): un certain nombre de pays vont être en mesure de fixer les prix pour les autres. La question est aujourd’hui de savoir qui sera dans cet OPEC de la batterie et qui sera le dindon de la farce ?
En plus de la Chine, quelques pays pourraient faire valoir leur position de force pour rejoindre le potentiel cartel: l’Australie a le lithium brut, l’Indonésie le nickel brut, la République du Congo le cobalt brut, la Finlande le cobalt raffiné, la Corée du Sud et le Japon la fabrication des électrodes (voir graphique plus haut).
L’Indonésie commence à developper une chaîne d’approvisionnement indépendante faisant levier sur ses ressources en nickel. Elle vise 140 Gwh intégrés en 2030. Le raffinage de nickel a démarré en 2021. L’Australie est sur le point lancer un plan national pour devenir un acteur majeur du raffinage des minéraux constitutifs des batteries. La Finlande depuis 2020 s’est donné comme objectif d’être l’expert numéro 1 en minéraux de batteries. La Corée du Sud met en place une alliance public-privé qui concerne les raffineurs, les producteurs d’électrodes et de batteries: toute la chaîne d’approvisionnement est concernée. Le Japon qui a été précurseur et perd des parts de marché a dévoilé un plan pour ne plus en perdre (rester à 20% d’ici 2030). Ce plan comprend des aides gouvernementales pour acheter des mines et renforcer les alliances avec les pays riches en ressource (Afrique, Amérique du Sud). L’ensemble de ces pays (le cartel) qui ont des points forts à valoriser risquent de vouloir faire payer ceux qui n’en ont pas spécifiquement comme les Etats-Unis ou l’Europe. La batterie lithium-nickel-cobalt ne permet pas de répondre aux besoins de croissance de la voiture électrique, au moins sur les prochaines années: son prix sera élevé et elle ne pourra équiper que le moyen/haut de gamme. Les gagnants seront en amont, pas en aval, ce qui posera probablement un gros problème à la filière dans son entier.
L’inévitable décade du fer
Les Etats-Unis ont compris qu’il ne fallait pas être du mauvais côté et ont lancé un plan massif en 2022, notamment pour acquérir de l’amont (lithium, graphite, nickel…et surtout LFP !): $135 milliards d’investissement. Ce plan s’ajoute aux $250 milliards de crédits bonifiés prévus pour transformer l’infrastructure énergétique. Les Etats-Unis réagissent comme à Pearl Harbor, l’ennemi étant cette fois la Chine, il ne faut pas les mésestimer.
Le plan européen de 2017 paraît très léger à $20 milliards, surtout qu’il n’est pas assez agressif sur la chaîne d’approvisionnement. L’Europe a un avantage naturel, sa population étant plus encline à acheter de l’électrique (plus de 10% des immatriculations sont électriques contre la moitié aux Etats-Unis). Cela peut expliquer aussi sa complaisance sur la nécessité de faire baisser les prix.
La réalisation va être brutale: le haut de gamme (cathode lithium-nickel-cobalt) ne concernera qu’une modeste partie du marché, déjà largement occupée par Tesla. Avec la cathode LFP, on aura d’ici 2030 une voiture bon marché avec 500 km d’autonomie et un temps de charge rapide; le réseau de chargement se sera largement amélioré; les ventes de voitures électriques LFP auront décollé. L’industrie va au naufrage si elle ne se convertit pas très rapidement aux cathodes lithium-fer-phosphate (LFP), les seuls gagnants étant alors le cartel sur des volumes limités pour le moyen/haut de gamme, profitant des subventions accordées par les pays perdants. La Chine, au travers de BYD et CATL, l’a compris et investit à fond sur la cathode LFP, redouble d’efforts pour assurer son approvisionnement en lithium. Tesla l’a compris aussi et adopte la technologie LFP pour ses nouveaux modèles. La prise de conscience a commencé aux États-Unis (question de survie pour les constructeurs automobiles): ils s’intéressent de plus en plus au lithium pour réduire le point bloquant sur les cathode LFP. Les mentalités se convertissent, les moyens sont là. Et l’Europe ?
Elle doit retomber de ses hauteurs technologiques, réaliser que le marché n’est pas acquis et considérer l’inévitable. Pour gagner, il faut des clients et la batterie LFP est la meilleure chance sur la prochaine décade: le fer et le phosphate sont abondants, mieux distribués que le nickel ou le cobalt, tant pour la production que le raffinage. Il faut revoir tous les plans, chercher plus activement à assurer ses approvisionnements en lithium et convertir ses giga-usines ! Stellantis a annoncé en 2023 vouloir adopter les LFP mais ses investissements disent le contraire. Va t-il devoir précipitamment importer chinois ? La solution sera-t-elle des giga-usines LFP chinoises sur le territoire européen pour aller plus vite ? Au moins le montage de Dunkerque est astucieux car il implique le chinois XTC dans une co-entreprise.
Finalement, l’espoir ne vient pas de Dunkerque mais de la Serbie qui est passée à l’action. Révolution Énergétique, le 16 mai 2023:
Voici la première giga usine de batteries LFP en Europe
Cette technologie de batterie aux multiples avantages était exclusivement importée d’Asie. L’Europe en produit désormais, grâce à la nouvelle usine ElevenEs de Subotica en Serbie. Cette société ambitionne de produire 48 GWh/an de batteries à partir de 2028, sans nickel ni cobalt.…
A partir de 2028… Cela donne une idée du retard accumulé et de l’urgence pour le reste de l’Europe (la Serbie ne fait pas partie de l’Union Européenne et n’a probablement pas sa voie au chapitre pour faire bouger le colosse).
Bonne fin de semaine…
Hervé